Innover à tous niveaux
Réaffirmer le caractère primordial de l’innovation
Pour une petite économie très ouverte sur le monde comme l’est la Wallonie, la recherche et l’innovation sont d’une importance cruciale pour le développement économique, mais plus largement pour l’ensemble de la société. En effet, l’innovation joue un rôle crucial dans l’augmentation du potentiel de croissance, mais également dans le développement de solutions visant à atteindre les objectifs sociétaux et de développement durable.
Court terme
- Être attentifs à la meilleure allocation des moyens budgétaires disponibles (Green Deal, RIS3…). La Wallonie n’est en effet pas en mesure de pouvoir disperser ses moyens et ses actions. Cet élément doit ainsi être intégré à la stratégie industrielle régionale afin d’en assurer la cohérence et d’en maximiser la portée.
- Définir les Domaines d’Innovation Stratégique (cf. RIS3) basés sur la réalité industrielle de la région, tout en les inscrivant dans le cadre des objectifs sociétaux (santé, environnement, habitat, circuits courts, vieillissement, économie circulaire…). Cet exercice est indispensable pour permettre d’identifier et renforcer les « locomotives » de notre économie et maximiser les effets d’entrainement sur le reste du tissu économique.
- Mettre à jour et renforcer l’argumentaire sur les atouts pour les activités de R&D en Wallonie au travers d’une compagne de communication adaptée et ambitieuse.
- Assouplir les critères des pôles de compétitivité et flexibiliser leurs structures de partenariats. Certains projets pourraient par exemple gagner à rassembler davantage de partenaires industriels et moins de partenaires académiques. Une proposition concrète allant dans ce sens a d’ailleurs été portée à l’attention du Gouvernement conjointement par les Pôles et l’UWE en juin 2020.
- Plus largement, identifier et solutionner, dans les mécanismes de R&DI collaboratifs, les multiples problèmes qui se posent à l'étape de la valorisation des produits de cette recherche.
Moyen terme
- La défragmentation du paysage institutionnel et des structures régionales est une priorité afin d’amener une plus grande force de frappe de nos structures et davantage de lisibilité et d’économies d’échelle. À cet égard, plusieurs priorités ont été identifiées :
- La rationalisation de l’écosystème de l’innovation. L’Union Wallonne des Entreprises a formulé récemment une proposition très complète en la matière ;
- Singulièrement, la composante des centres de recherche est une priorité. À cet égard, la création de plateformes technologiques privées/publiques de niveau international (ex. « IMEC » wallon) ainsi que l’articulation des Centres de Recherche Agréés (CRA) sur des thématiques stratégiques plutôt que sur des secteurs est nécessaire.
- Solutionner le problème de la dispersion des activités de recherche dans les universités et favoriser les synergies avec les CRA.
- Développer de nouveaux (business-) modèles de la R&DI partenariale mixant les ressources publiques et privées, leurs compétences et leurs expériences, et appliqués aux préoccupations actuelles et d’avenir. En effet, ce type de partenariat est souvent source d’avancées conséquentes et rassembleuses.
Conforter la place de la Wallonie à la pointe de la R&D en maximisant la participation des Wallons aux programmes de recherche européens
Obtenir un financement européen est une preuve d'excellence. L'Europe ne finance que les technologies d'avenir, et seuls les acteurs apportant une expertise de très haut niveau seront sélectionnés. La Wallonie se doit donc, compte tenu de son ambition en matière de recherche et d’innovation, de participer au développement de ces technologies de pointe qui assureront le renforcement de la compétitivité de son économie.
Dans le programme Horizon Europe, la Commission a proposé une enveloppe de 100 milliards d’euros (le financement le plus important jamais proposé pour un programme-cadre), sur l’ensemble de sa programmation (2021-2027).
Pour une économie très ouverte sur le monde, la recherche et l’innovation sont d’une importance cruciale pour le développement économique, mais plus largement pour l’ensemble de la société.
Ceci illustre l’importance stratégique d’une participation ambitieuse des acteurs wallons à l’initiative Horizon Europe. A cette fin, il faut optimaliser et coordonner les actions des acteurs wallons (NCP Wallonie, Pôles de compétitivité, réseau E.E.N, etc.) et veiller à l’absence de redondances entre les actions.
Une véritable complexité est constatée pour entrer dans les projets européens et un accompagnement est nécessaire pour surmonter la barrière d'entrée.
- Il ne suffit donc pas que l'écosystème wallon de la R&DI dispose de toutes les pièces nécessaires, il faut également qu'elles soient bien agencées, lisibles et disposent de la masse critique nécessaire à leur efficacité.
- Assurer adéquatement le relais, une fois les résultats de la R&D valorisables, avec les soutiens publics en matière d'investissements (primes, invests...), afin d'assurer la création d'activités sur le territoire régional. Plus largement, il convient de fluidifier l’ensemble des processus d’accompagnement des entreprises, depuis la phase de création jusqu’à la phase d’exportation.
Accélérer la transformation numérique
Développer la connectivité sur le territoire wallon
Le numérique ne peut pas se développer sans une excellente connectivité fixe et mobile, s’appuyant notamment sur les dernières technologies dont la 5G. ll sera donc nécessaire de disposer en Wallonie d’une connectivité sans faille permettant alors d’exploiter toutes les potentialités du numérique dans l’organisation du travail. Ceci étant d’autant plus vrai que la topographie et la densité démographique de la Wallonie trouveront dans une excellente connectivité un argument de développement, voire de désenclavement, essentiel pour augmenter son attractivité économique. Si la connectivité est importante à court terme dans les circonstances actuelles, les vrais enjeux sont sur le long terme. Cette connectivité devra disposer de la couverture nécessaire pour rendre accessible la totalité du territoire wallon et de la capacité suffisante pour acheminer l’augmentation exponentielle des données provenant et à destination des utilisateurs finaux. Cela passera inévitablement par une reconsidération des normes d’émission (des antennes) et une fluidité dans la gestion administrative des dossiers d’environnement et d’urbanisme. Sur cette question, le rôle des autorités porte donc en partie sur des investissements mais bien davantage encore sur l’autorisation et la facilitation de ces investissements.
Faire du numérique une priorité dans les entreprises et les administrations wallonnes au travers de l’évaluation de la maturité numérique des organisations et des compétences numériques des collaborateurs
Cette mesure se basera sur deux piliers principaux :
- L’évaluation de la maturité numérique de l’entreprise/l’administration en elle-même : sensibilisation à grande échelle au diagnostic numérique et à la nécessité d’évaluer et de positionner les organisations wallonnes au niveau de leur capacité à intégrer pleinement les technologies numériques dans l’ensemble de leur organisation et de leurs activités (cette notion étant souvent liée au terme de la «transformation digitale» d’une entreprise qui désigne l’utilisation de la technologie dans l’objectif d’optimiser les performances d’entreprise) ;
- Le diagnostic des compétences numériques des collaborateurs de l’entreprise/l’administration : mesure du niveau de compétences numériques des travailleurs, couplée à la valorisation des efforts mis en place le cas échéant par les organisations en matière de transformation numérique et de formation de leur personnel aux soft et hard skills digitales.
L’UWE propose que cette mesure se concrétise sous la forme d’un reporting annuel, public et pérenne de toutes les sociétés et administrations wallonnes sur :
- Le résultat de l’évaluation en tant que telle de leur maturité numérique et du diagnostic des compétences numériques de leurs collaborateurs.
- Une proposition de plan visant à réaliser des progrès en matière de digitalisation de leurs activités au cours des prochaines années.
Des avantages immédiats devraient être liés à la mise en place de cette mesure, par exemple : bénéficier plus aisément d’aides publiques pour les entreprises en progrès (dont les bassins-emplois-formations), jouir d’un accompagnement privilégié pour les entreprises les plus proactives afin d’en faire de véritables « championnes du numérique » régionales.
La mesure permettra également de favoriser le dialogue sur le numérique avec les représentants des travailleurs pour assurer une adhésion de chacun aux avantages de la digitalisation.
L’UWE propose que cette mesure soit déployée en partenariat étroit avec l’Agence du Numérique, chargée de la mise en œuvre de la Stratégie numérique pour la Wallonie (Digital Wallonia), et outillée à cet effet.
Il est proposé également de consolider cette mesure au travers des deux initiatives complémentaires suivantes :
- Faire de 2021 « l’année du numérique » et tirer un bilan général de la maturité numérique wallonne durant toute cette année.
- Mettre en place un Prix du Numérique (dont les modalités doivent être discutées) sur le modèle de l’Entreprise de l’année ou du Best Workplace, qui récompenserait et valoriserait l’entreprise qui aurait mis en place des actions de développement de sa maturité numérique et d’amélioration des compétences de son personnel durant l’année.
Développer de nouvelles formes de concertation sociale répondant à l’évolution des façons de travailler (new ways of working, NWOW)
Le numérique a complètement modifié nos façons de travailler et nos pratiques relationnelles de travail au sens large (managériales, d’équipe, avec les partenaires et clients, …). Pourtant, la concertation sociale avait, quant à elle, jusqu’à présent encore peu évolué avec les nouvelles technologies.
La crise du Covid-19 et le confinement forcé qui s’en est suivi sont venus chambouler cet état de fait en obligeant les parties prenantes à se réinventer au travers des outils digitaux pour permettre une certaine continuité des pratiques relatives à la concertation sociale en entreprise (Assemblées Générales, discussions entre les travailleurs et les représentants syndicaux, …). Avec des retours positifs au niveau de la pratique : remontées d’informations du personnel beaucoup plus importantes et diversifiées qu’en temps normal, dynamique de groupe intéressante au niveau de la prise de parole, …
Cette mesure permettrait dès lors de capitaliser sur l’expérience réussie de la crise sanitaire pour développer de façon plus prononcée les outils numériques pour renforcer le dialogue et faire entrer la concertation sociale en entreprise « dans le 21ème siècle ».
Soutenir l’implémentation et le développement du télétravail structurel en Wallonie
Les trajets voiture domicile-travail représentent 20 milliards de km soit 23,5% des 85 milliards de km parcourus en voiture en Belgique. Si tous les navetteurs télétravaillaient 1 jour/semaine au lieu de 0,5 jour/semaine (comme c’était le cas avant la crise du Covid-19), les trajets domicile-travail diminueraient de 10% et le trafic automobile total de 2,4%. Deux jours/semaine réduiraient quant à eux de 30% les trajets domicile-travail et le trafic automobile total de 7,1%.
Un autre avantage majeur du télétravail réside dans le fait qu'il permet principalement d'éviter les déplacements en voiture aux heures de pointe du matin et du soir et de mieux les répartir sur la journée. 2 jours/semaine de télétravail réduiraient ainsi de 15% le trafic automobile aux heures de pointe permettant d'éliminer une majorité des embouteillages.
D’autre part, la crise a convaincu bon nombre d’employeurs de l’efficacité du télétravail et a mis en évidence les points d’attention et les critères de réussite pour le futur. C’est ce qu’a notamment démontré une étude menée en juin 2020 par SD Worx et l’Union Wallonne des Entreprises auprès d’un échantillon représentatif des employeurs wallons. Cette enquête a montré également un changement important de point de vue par rapport au télétravail «avant» et «après» la crise.
Ainsi, l’enquête a démontré qu’il y aura, après la crise, une forte augmentation des possibilités liées au télétravail auprès des entreprises wallonnes. 90% des employeurs comptent en effet continuer à offrir à leurs collaborateurs la possibilité de faire du télétravail. C’est une augmentation significative car ils n’étaient que 50% avant la crise. 43% des travailleurs wallons devraient ainsi pouvoir continuer à travailler depuis leur domicile. Les chiffres sont plus élevés dans les PME de moins de 50 travailleurs : 62% des collaborateurs feraient du télétravail. Les Wallons qui s’adonneraient au télétravail structurel, le feraient entre 1 et 2 jours par semaine. La décision de recourir au télétravail structurel résiderait principalement dans la nature du travail effectué.
Il s’agit d’une évolution majeure, rarement vue auparavant. L’étude a également prouvé que non seulement les collaborateurs sont demandeurs, mais également que les employeurs en voient les bénéfices d’un point de vue managérial. Selon 92% des entreprises wallonnes interrogées, le télétravail se déroule aussi bien, voire mieux que prévu.
Cette mesure vise donc à soutenir une implémentation massive du télétravail structurel en Wallonie et à faire évoluer les pratiques de télétravail existantes vers une « new normal » de deux jours par semaine, préconisée pour ses effets positifs démontrés sur la mobilité (cf. supra).
La mise en place de cette mesure nécessiterait d’œuvrer sur les éléments suivants :
- Une approche sectorielle fixant un mode de fonctionnement ;
- La guidance en matière de politique de télétravail.
Le télétravail structurel demande en effet l’adoption d’une politique formelle et écrite, avec entre autres une indication claire sur la fréquence du recours au télétravail. On constate que, bien que le télétravail soit déjà pratiqué parmi les répondants, une majorité d’entre eux n’a pas encore de politique formelle et écrite en matière de télétravail et qu’il existe de grandes disparités en fonction de la taille des sociétés.
Miser sur l’innovation dans le secteur des transports et de la mobilité
La mobilité et le transport sont et seront de formidables ambassadeurs des possibilités de la révolution numérique. Anticipons les mouvements sur ces sujets en développant des actions et des projets de pointe, dans tous les modes de transport, tant en ce qui concerne les véhicules (véhicules connectés et autonomes, carburants alternatifs, sécurité, économie d’énergie …) que l’exploitation des réseaux (Intelligent Transport Systems, Smart Cities …).
- Développer une véritable vision régionale et des mesures pour assurer l’intelligence des réseaux wallons de transport (Intelligent Transport Systems) ;
- Développer une véritable vision pour les carburants alternatifs (véhicules électriques, hybrides, CNG, LNG) et accentuer la coopération avec le secteur privé, notamment via des appels d’offres pour l’installation d’infrastructures ;
- Se positionner activement dans les recherches, le développement et l’exploitation des véhicules connectés et autonomes et de leurs besoins en infrastructures matérielles et logicielles ;
- Assurer l’harmonisation, la mise à disposition et l’intégration des données publiques et privées de mobilité (Open Data) afin de permettre le développement d’applications et de logiciels de gestion et de tarification de la mobilité, des transports et de la multimodalité (tant personnes que marchandises) ;
- Fournir un cadre législatif pour répondre aux innovations dans le secteur (notamment pour les véhicules connectés et autonomes).